mardi 31 juillet 2012

Il n’y a pas d’idées prématurées, il y a des moments opportuns qu’il faut savoir attendre.


Il y a du vent dans les voiles et cela s'agite sur le pont, mais la direction du vent n'est pas claire et la boussole vacille bizarrement.

La décision du 29 juin dernier d'ouvrir les fonds de stabilité (EFSF + futur ESM) aux programmes de recapitalisation des banques a justement été salué par les marchés, avant que ceux-ci ne s'inquiètent tout aussi logiquement de leurs moyens limités face à l'orage qui continue de gronder. Et l'orage est sérieux, la dette espagnole est maintenant au-delà de 7% ce qui n'est tout simplement pas tenable bien longtemps. Alors ça cogite, ça rêve tout haut, et ce d'autant plus facilement que c'est la période des vacances.


L'annonce mystérieuse de Mario Draghi le 26 juillet, promettant la lune aux marchés, a certes offert une bulle d'oxygène à l'Espagne, mais risque de créer bien des désillusions. Certains rêvent fort bruyamment d'un engagement illimité de la BCE en faveur des dettes souveraines européennes. Ce rêve a pour lui la facilité, que Dieu nous préserve de sa réalité. Heureusement avant une intercession divine nous aurons assurément  à une intercession allemande pour dire non au miroir aux alouettes, au puits sans fin, à l'effondrement complet du système dans quelques temps si nous ne nous attelons pas à des solutions un peu plus contraignantes.

Oui il faut aider l'Espagne. et la crise qui touche l'Espagne est d'autant plus révoltante que l'Espagne a su maîtriser ses finances publiques avant la crise (dette/PNB de 40% en 2008), et tous ses malheurs surviennent d'un euro qui lui a donné un crédit facile, qui a alimenté une bulle immobilière qui a ruiné ses banques et qui ruine maintenant son état. Si le régulateur bancaire, espagnol ou européen, avait mis un frein à la bulle, l'Espagne ne serait pas en crise. L'europe, qui a mis 11 ans avant d'articuler un semblant de régulateur européen (l'EBA), tellement faible que deux après on reparle de la nécessité de créer un vrai régulateur bancaire européen, cette Europe-là est coupable. Elle est bel et bien responsable des maux de l'Espagne d'aujourd'hui. Donc au delà de tout jolis principes de solidarité européenne, cette Europe se doit de réparer les tords qu'elle a commis et doit aider. Sérieusement.

Je ne pense pas que nous ayons la farandole des beaux rêves de ceux qui veulent voir en la BCE un bailleur de fond de dernier ressort mis à toutes les sauces. Non il serait beaucoup plus sage de ressortir l'idée du Rédemption Fund, avancée par votre serviteur sur son blog précédent (www.europelibre.typepad.com), et beaucoup plus doctement présenté par le German Council of Economist Experts. Un Fond européen de 2,6 trillion d'Euro, pour racheter progressivement le stock des dettes des États de l'Eurozone qui les fait dépasser le ratio dette/PNB de 60%.  Ce fond permettrait de refinancer les États à 25 ans au taux auquel pourrait se financer ce fond européen sur les marchés. C'est cela le bazooka intelligent dont je rêve. Il est suffisant pour mettre fin à la crise des dettes souveraines. Il est réaliste car même s'il est énorme il est néanmoins limité en volume au stock actuel de dettes, et donc limité dans le temps, il est réduit progressivement à zéro sur une période de 25 ans, et donc il peut trouver un échos en Allemagne. Il est juste, tant vis à vis de l'Europe qui assume par là ses négligences passées, que vis à vis des États qui doivent néanmoins rembourser. Et enfin il nous permet de faire des pas de géant en matière de gouvernance car il doit bien évidemment être conditionné à des réformes majeures en Europe, régulateur bancaire unique et puissant en Europe, pouvoir accru donné à l'Europe (Commission? nouvelle institution fédérale limitée à l'Eurozone?) pour contrôler les politiques budgétaire et fiscales des États, pour mettre en place et contrôler une politique de compétitivité et de croissance en Europe. Le tout contrôlé par plus de démocratie, pour que ce tout soit légitime, donc puissant et acceptable.

Rassurez-vous, ce n'est bien entendu pas ce que Mario Draghi et les Chefs d'État et de Gouvernement européens vont sortir de leur chapeau dans quelques jours. Non je pense que l'on aura droit plutôt à une politique de rachat de la dette souveraine espagnole par l'EFSF et par la Banque Centrale. Ce sera un petit pas dans la bonne direction. Suffisant pour ravir les marchés quelques jours, avant de constater que l'EFSF ou l'ESM ne pourront pas faire la même chose sur l'Italie. Alors on viendra tout logiquement à ce brave Redemption Fund. 

Bref c'est encore Monnet qui a le dernier mot : ''il n'y a pas de solution prématurée, il y a simplement des circonstances qu'il faut attendre''...

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